< Il [l'artiste] ne juxtapose pas des exemplaires de la figure ; à chaque fois, il combine un élément d'un exemplaire avec un autre élément de l'exemplaire suivant. Dans le processus dynamique de la construction, il introduit un déséquilibre, une instabilité, une dissymétrie, une sorte d'ouverture, qui ne seront conjurés que dans l'effet total.

Gilles Deleuze. 

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ALe pouvoir de naviguer et de voir.

Contempler le monde et essayer d'y être à notre manière est une tâche à laquelle nous sommes tous soumis quotidiennement. La vie telle qu'elle existe de manière différente pour chacun d'entre nous, et nous lui conférons des formats qui remodèlent les impressions, les choses, les relations et qui changent au fur et à mesure qu'ils sont traversés par les événements. Reste la curiosité de savoir ce que chacun fait - et comment il agit - face à la fatalité d'habiter un monde multiple, excessif et de plus en plus activé par l'état on-Line en technicolor. 

Avoir l'occasion d'assister à un long processus inventif et expérimental, comme dans cette exposition d'André Santangelo, c'est être témoin de ce qui se passe à différents moments de la démarche d'un artiste qui tente de dévoiler l'univers photographique, en approfondissant sa relation avec ce domaine depuis 1980. Pour cette exposition, l'artiste et le commissaire ont sélectionné des photographies qui appartiennent à l'origine à des groupes de séries réalisées au cours de quelques années de pratique, en les réorganisant pour donner naissance à d'autres ordres de signification, capables d'indiquer des noyaux de singularités au sein d'ensembles préconstitués. 

Les revers, l'instabilité, les échecs auxquels renvoie le naufrage - exprimé dans le titre - soulignent la manière de penser et de faire des images de l'artiste.  Dans la façon de voir et de faire de Santangelo, certains éléments sont omniprésents et imprègnent les œuvres que nous voyons ici, comme le temps, la simultanéité, les répétitions et les différences, qui se combinent avec des champs chromatiques, des illusions d'optique, des dynamiques de mouvement et des agencements de concepts qui, avec un regard d'une extrême sensibilité, mettent en relation les choses, des animaux, des insectes et des personnes, en les associant à des paysages qui semblent apparaître et disparaitre à tout moment comme si ils ne voulaient pas se dévoiler complètement, en attirant l'attention sur ce qui a été ou sur ce qui est à venir.

Trois noyaux principaux ont été idéalisés : A. Desvio para o Azul (Déviation vers le bleu), qui indique les constantes céruléennes du ciel et de la mer, très présentes dans l'ensemble de la production de l'artiste ; B. Os Cianos (Les Cyans), qui résulte d'expériences récentes avec la technique d'impression cyanotype, et C. Somos (Nous Sommes), qui nous met en contact avec la vision que l'artiste a de l'être humain dans son expérience de voyage en Inde en 2005/2006. Il y a aussi la ligne du temps, construite de manière circulaire pour caractériser un flux de production qui permet de changer les points d'observation et les formes de pensée contenus dans le va-et-vient de la temporalité, et qui sont présents dans le processus de construction artistique de Santangelo.

Le naufrage de l'image peut être une manière de voir le monde.